On reconnait ici le talent de Sammo Hung, lequel ne se prive jamais de court-circuiter son film par de brusques ruptures dramatiques et changements de ton. La séquence du massacre de la troupe est ainsi significative du personnage. Après trois quart d'heure de comédie, il place une scène d'une rare violence, totalement incongrue par rapport au reste du métrage: en quelques minutes tous les acteurs et actrices sont égorgés au sabre et Sammo s'attarde complaisament sur les corps tranchés d'où gicle un sang épais.
Tout le film se situe donc en équilibre instable entre la violence et l'humour, entre la barbarie et le burlesque. Dans une séquence, Sammo Hung fait une éblouissante démonstration de ses aptitudes martiales en effectuant une calligraphie complexe. Mais il n'oublie pas de multiplier les gags pour se moquer de lui-même. Comme si l'homme, constamment partagé entre le respect des traditions et la volonté de briser les convenances, se plaçait constamment dans une attitude schyzophrène.
"Prodigal Son" est donc une excellente comédie kung-fu (quoique le film soit peut - être un rien surestimé) qui s'impose comme un divertissement de choix. Chacun se doit de l'avoir vu, ne serait-ce que pour mesurer l'énorme influence qu'il a exercé sur le genre. |